L’exemple des jussies

 

Les jussies sont des plantes herbacées, vivaces, fixées, et amphibies et présentant un polymorphisme important selon les régions, les milieux et leur stade de développement.

Elles vivent ancrées dans le substrat jusqu’à 3 mètres de profondeur en occupant toute la lame d’eau et s’étendent aussi au-dessus de l’eau jusqu’à 80 cm de hauteur.

Elles peuvent coloniser très rapidement les zones humides, telles que les berges des rivières et des plans d’eau, les prairies humides, les marais, etc… La colonisation de nouveaux milieux se fait essentiellement à partir de fragments végétatifs ou boutures, dès lors que ces dernières comprennent un nœud. En milieu lentique, des germinations de graines peuvent être observées, mais la contribution de ces semis à l’invasion des sites reste mal connue. Les graines pourraient par exemple être à l’origine d’un introduction par des animaux (canards, ragondins, …). Mais les jussies ont souvent été introduites volontairement ou non, par l’homme ou ses activités : vidanges de plans d’eau ou d’aquarium, déplacements d’engins ou de terre depuis un site contaminé, et navigations… Il a été montré que les canoés et les kayaks transportaient par exemple des fragments végétatifs de plantes aquatiques et étaient aussi responsables de la dispersion des jussies.

Trois espèces de jussies sont présentes en France, qui appartiennent à la famille des Onagracées et au genre Ludwigia.  Parmi elles, seules deux sont invasives (décrites ci-dessous), la troisième étant la jussie des marais (Ludwigia palustris).

  • Ludwigia peploides subsp. montevidensis (Raven) ou Jussiaea var. montevidensis (Munz) – Jussie rampante
  • Ludwigia grandiflora subsp. hexapetala (Nesom & Kartesz) ou Jussiaea uruguayensis forma major (Munz) ou L. hexapetala (Raven) – Jussie à grandes fleurs

Jusqu’à la floraison, il s’avère presque impossible de distinguer macro-morphologiquement les deux espèces (qui sont aussi invasive l’une que l’autre). Toutefois, la forme des stipules constitue un caractère de diagnostic assez fiable, quel que soit l’état de développement des plantes. Un tableau résumant les principaux critères de distinction entre les deux espèces est présenté dans les fiches Ludwigia gradiflora et Ludwigia peploides.

Ces deux espèces invasives sont les seules plantes invasives, dont la commercialisation, l’utilisation et l’introduction dans le milieu naturel sont actuellement interdites par un arrêté ministériel (publié au J. O. n°114 du 17 mai 2007).

Les impacts écologiques constatés dans les secteurs infestés sont une forte réduction locale de la biodiversité floristique, une régression drastique des populations de Scirpus pungens et de Potamongeton natans (étang de Léon – Landes – Dandelot 2004), un obstacle aux déplacements des poissons (Legrand 2002) et des mortalités de poissons ont même été constatés au sein des herbiers denses (Gerepi 2000 et Guernion 2006) jusqu’à provoquer une mortalité spectaculaire de bancs entiers de poissons (Dandelot 2004).

Impacts sur les usages :

les herbiers constituent une gêne très importante pour les usages nautiques et la pêche et pour les prises d’eau.

 

Ludwigia grandiflora

Ludwigia peploides

invasion du Vidourle par les jussiesCapsule de jussie contenant les grainesJussie (forme aquatique) en fin d'hiver - mars 2014 - TêtJussie en fin d'hiver - mars 2014 - TêtRhizomes de jussie en fin d'hiver - mars 2014 - Têt

 

Sources bibliographiques :

  • Coudreuse, J., B. Ruaux, and J. Haury. 2007. Analyse de l aphénoplasticité de la Jussie en réponse à l’influence de facteurs biotiques et abiotiques en conditions semi-contrôlées. 2ème rencontres francophones « Invasions biologiques et traits d’histoire de vie », Rennes.

  • Dandelot, S. 2004. Les Ludwiga spp. invasives du sud de la France: Historique, Biosystématique, Biologie et Ecologie. Paul Cézanne.

  • Dandelot, S., S. Ferreti, and H. Abou-Hamdan. Analyse de l’efficacité d’un traitement par le sel pour lutter contre la prolifération de la Jussie Ludwigia peploides Kunth (Raven) en Camargue.

  • Dutartre, A. and A. Fare. 2002. Guide de gestion des proliférations de plantes aquatiques., Agence de l’Eau Adour Garonne, Cemagref, Unité de Recherche Qualité des Eaux.

  • Dutartre, A., J. Haury, S. Dandelot, J. Coudreuse, B. Ruaux, E. Lambert, P. Le Goffe, and M. J. Menozzi. 2006. Les jussies: caractérisation des relations entre sites, populations et activités humaines. Implications pour la gestion., Cemagref.

  • Pipet, N., A. Dutartre, M. Bou, F. Havet, V. Chapeau, C. Legrand, G. Poirier, and L. Prunault. 2003. Etude des capacités de germination des jussies du marais poitevin en conditions de laboratoire. Institution Interdépartementale du Bassin de la Sèvre Niortaise.

  • Ruaux, B. 2008. Les plantes envahissantes des corridors fluviaux : traits biologiques, impacts de Ludwigia peploides et L. grandiflora en Loire moyenne et implications pour la gestion